Moment entre filles? (PV Amélie)

La jeune femme réfléchit un moment. Oui, c'était bien vrai, c'était un outil comme un autre, mais la manière dont elle avait formulé la suite était totalement faux. Ce n'était pas vrai que l'on pouvait survivre sans école et qu'on pouvait tous être remplacé. Ok oui nous pouvions tous l'être, mais jusqu'à un certain point... L'école était nécessaire aujourd'hui à tous. Il fallait savoir compter, écrire, lire, raconter, calculer, etc. Sinon, c'était la misère. Cette petite anarchiste pensait-elle qu'elle pouvait vivre correctement sans études? Pas vraiment. Elle allait vivre la misère si elle ne finissait pas son secondaire au minimum.

-C'est vrai, je te l'admet, l'école est un moyen comme un autre, un outil, comme tu le dis. Par contre, ce n'est pas vrai que c'est seulement utile à ceux qui ne voient pas la vie et qui ne sont pas capables de l'affronter. Peut-être que pour toi, ce n'est rien, mais sans études, c'est la misère qui t'attend. Le monde difficile et rough de la rue. Aujourd'hui, il est presque impossible de vivre correctement sans son diplôme secondaire. Par correctement, je ne veux pas dire de se fondre dans la masse comme des robots, comme tu sembles le penser, au contraire, je veux parler d'avoir une vie moyenne, acceptable tout en ayant un certain confort.

Elle fit une courte pause et prit une gorgée de son moca. Le tout fait, elle prit une bouchée de son panini, s'essuya la bouche avec une serviette et revint à ce qu'elle disait.

-L'école d'aujourd'hui, je suis d'accord, ne sert plus qu'à s'instruire- comme autrefois-, mais forme aussi nos fonctionnaires et nos travailleurs. Sans eux, c'est le système qui s'écroule. C'est vrai que l'étudiant n'a plus le statut d'étudiant. Autrefois, l'étudiant était un élève qui VOULAIT apprendre. Aujourd'hui, on les FORCE à apprendre. Étant moi-même une enseignante, j'avoue que je trouves ce concept absurde. Parfois je me demande ce que certains font dans mes classes. Bref, l'école, aujourd'hui, est plus que nécessaire -si je puis le dire - à la vie en grande ville. En campagne, si tu veux te partir un petite fermette, bonne chance. Tu vas voir que les temps sont durs...

Pour marquer la fin de son monologue, elle prit une longue gorgée de moca et commença à manger son panini.

L'adolescente n'eut qu'un grand sourire. La vie dans les rues, c'est la misère? Voyons! C'est la liberté, c'est faire ce que l'on veut, c'est de faire trembler ceux qui ont préféré la sécurité rassurante du ''confort'' à la vie d'aventure. Elle vivait sa vie pleinement, elle avait plus d'expérience que n'importe quel adulte qui a vécu avec la sécurité d'une maison et d'une famille bienveillante. Ces gens se plaignent à rien, elle, par contre, ne faisait que suivre le mouvement de sa vie sans pleurer, sans se sentir retenue par quoique se soit. Le seul remord qu'elle avait concernait sa mère, mais cela n'allait pas être pour bien longtemps. Elle n'avait pleurer personne, elle n'avait jamais pleurer sur son sort. La vie est magnifique car elle n'a pas les chaines du ''bonheur moderne''.

Elle but quelques gorgés, laissant croire à la femme qu'elle l'avait convaincue, mais seulement pour quelques instants.

-Vivre dans le confort? Quel confort? Le confort matériel est si peu nécessaire. Je dirais même qu'il écrase totalement le confort de notre tête. Qui a le plus de regret? Celui qui vit depuis toujours dans la rue, sans argent, sans maison, ou celui qui a été à l'école, qui a suivit ce que la société dicte? Je n'ai jamais vu un sans-abri pleurer parce que la fille ou le gars de ses rêves ne le ou la regarde pas!

Elle eut un petit rire, et reprit, amusée :

-Vous dites que la vie dans les rue est rough? Avez-vous déjà vécu dans les rues? Sur quoi vous basez-vous? C'est une belle vie, en fait. Bien plus belle que celle du confort que vous, gens moyens, aimez tant. Et ne me sortez pas cette connerie qu'il y en a qui n'ont pas le choix, c'est pas vrai. Il y bien, bien pire que vivre dans les rues.

Elle prit une gorgée, posa sa tasse, se pencha vers l'arrière et s'étira, puis s'installa plus confortablement. Elle avait encore un sourire au visage, se remémorant rapidement certains moment de sa vie dans les rues. Ça, c'était là vie, et cela lui manquait.

-Ouaip, bien, bien pire.